Le coût marginal zéro aura-t-il raison du capitalisme ?

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En 2014 sortait un ouvrage qui fit dès sa publication l’effet d’une bombe. Et pour cause : son auteur, Jeremy Rifkin, prophétisait à plus ou moins court terme la fin de l’économie de marché telle que nous la connaissons, remplacée par une économie collaborative rendue possible grâce à l’essor et à la démocratisation des nouvelles technologies. Retour sur un best-seller qui, six ans après sa parution, n’en finit pas de susciter espoirs et polémiques.

Théoricien de la « troisième révolution industrielle »

Lorsqu’est publié « La nouvelle société du coût marginal zéro : l’internet des objets, l’émergence des communaux collaboratifs, et l’éclipse du capitalisme », Jeremy Rifkin est depuis longtemps considéré comme un penseur majeur de son époque. Né en 1945, cet écrivain américain s’est spécialisé dans l’art délicat de la prospective scientifique et économique. Au sein de sa fondation, la FOET (Foundation on Economic Trends), il analyse l’impact de nos sociétés modernes sur l’environnement, l’économie, la technologie et la culture, tâchant de prédire de quoi sera fait le futur proche. Inlassable conférencier, Jeremy Rifkin a, depuis 1975, propagé et médiatisé sa vision d’une troisième révolution industrielle, à laquelle ont depuis adhéré le Parlement européen ainsi que de nombreuses entreprises tant publiques que privées.

Penseur influent

Dès les années 1980, il s’implique dans la lutte pour la préservation de l’environnement, et se rapproche de Greenpeace tout en exerçant la fonction de conseiller auprès de la Commission européenne, des Premiers ministres espagnol, portugais et slovènes, ainsi que de la chancelière allemande. Il participe aussi à l’élaboration de plans directeurs pour les villes de Rome, San Antonio et Monaco, leur appliquant ses préceptes chers à l’environnement et au développement durable. Ses 23 ouvrages abordent quant à eux des sujets aussi vastes que les biotechnologies, le rôle de l’empathie, l’évolution du travail, le modèle européen, la transition écologique… et la mutation du capitalisme.

Qu’est-ce que la « société du coût marginal zéro » ?

Que défend J. Rifkin dans sa « Nouvelle société du coût marginal zéro » ? Selon lui, le capitalisme n’a que très peu évolué dans ses fondements, établis dès la fin du XVIIIe siècle par Adam Smith. Les recettes seraient à peu près restées les mêmes, à savoir une maximisation des rendements et profits grâce à des processus de fabrication toujours plus optimisés.

Au cours de cette production intervient le facteur du « coût marginal », qui définit le coût supplémentaire induit par la dernière unité produite et qui influe donc sur la marge effectuée par le fabricant. Pourtant, cet équilibre serait à la merci d’un grain de sable et pourrait bien s’effondrer très prochainement.

La technologie permettant de réduire toujours plus ce coût marginal serait susceptible d’entrainer une concurrence acharnée, annihilant tout profit réalisé par des entreprises devenues ultra concurrentielles. Dès lors, l’initiative privée serait amenée à disparaitre, cédant la place à un nouveau système d’organisation œuvrant non plus pour le gain, mais pour l’amélioration de l’humanité.

Un changement déjà amorcé

Cette « société du coût marginal zéro » serait déjà à l’œuvre, comme tente de le démontrer J. Rifkin. Internet en constituerait l’exemple le plus révélateur. Une information décentralisée, gratuite et accessible à tous, reproductible à loisir et distribuable à volonté n’illustre-t-elle pas cette tendance ? Dans cette nouvelle configuration, les consommateurs sont peu à peu devenus des producteurs de contenus, comme en témoignent des sites tels que YouTube ou Wikipédia.

L’arrivée de ces « prossomateurs » dans des secteurs autres que le numérique semble pour l’auteur inéluctable, produisant des changements majeurs notamment dans les domaines de l’énergie et de l’industrie.

Quelques ombres au tableau

Si personne ne doute du sérieux ni de l’implication de Jeremy Rifkin, ces prédictions imaginant un effondrement du capitalisme de profit, la gratuité des biens tant numériques que physiques (grâce à la démocratisation de l’impression 3D) ou encore un accès illimité à la culture se doivent néanmoins d’être nuancés. Les exemples de YouTube et de Wikipédia dont les contenus sont rédigés par des prossomateurs, sont loin d’être majoritaires sur une toile majoritairement régie par les GAFAM et autres BHATX.

Les révolutions promises par l’impression 3D et l’Internet des objets tardent à se manifester, et le capitalisme tel que nous le connaissons a jusqu’à présent survécu à des situations bien plus dangereuses pour lui.

Au fil de ces 295 pages, Jeremy Rifkin tente d’imaginer un futur proche, qui devrait voir ses prédictions se réaliser d’ici l’an 2050. Seul l’avenir nous dira qui, du capitalisme ou de la société au coût marginal zéro, sortira vainqueur de l’affrontement.

Sources des photos : amazon.com et heraclite.pro

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