Le bras de fer commercial qui oppose Washington à Pékin s’intensifie et génère une liste toujours plus longue de produits d’importation surtaxés de part et d’autre du Pacifique. Toutefois, le véritable champ de bataille entre les deux superpuissances pourrait être celui des sciences et des technologies, grâce auxquelles les États-Unis peuvent encore peser sur la Chine. C’est dans ce contexte que Xi Jinping a plaidé pour une indépendance high-tech de son pays.
Dans un discours donné dans le cadre de l’Académie chinoise des sciences, le président de la république populaire a clairement affiché son ambition de faire de la Chine un leader mondial dans le domaine des high-tech. Il a également évoqué l’absolue nécessité de la rendre technologiquement indépendante et d’intensifier sa capacité d’innovation pour, selon lui, « réussir l’objectif de construire une nation socialiste moderne et réaliser le rêve du rajeunissement de la nation chinoise ».
La faiblesse dans la recherche chinoise
Xi Jinping a par ailleurs fait sien un adage qui dit qu’un problème bien posé est à moitié résolu et n’a pas hésité à pointer les faiblesses de la recherche chinoise, en particulier celle du secteur privé. « Les entreprises ne font pas assez de recherche fondamentale, les résultats originaux majeurs sont absents». Enfin, selon lui, la Chine manque de capacité pour produire des composants essentiels comme les microprocesseurs et développer des systèmes d’exploitation ou des algorithmes.
Selon le Quotidien du Peuple, la Chine aurait importé 230 milliards de dollars de puces électroniques en 2016, ce qui la rend vulnérable, à l’image de l’affaire ZTE. En avril, Washington a interdit aux entreprises américaines de vendre des composants à l’équipementier télécoms chinois, accusé de violer l’embargo sur l’Iran. Peu après, le Congrès américain a proposé de renforcer le Comité sur les investissements étrangers (CFIUS) pour limiter les partenariats avec les entreprises chinoises et empêcher d’éventuels transferts de technologies.
Made in China 2025
Les États-Unis mettent la pression sur Pékin et selon Xu Jianwei, économiste chez Natixis, plus celle-ci sera importante, plus urgente sera la nécessité pour la Chine de développer ses propres produits high-tech. Pour le gouvernement de Pékin la problématique est de taille ; les entreprises chinoises doivent maîtriser des nouveaux procédés de fabrication. Fabriquer des semi-conducteurs est une opération complexe pouvant mobiliser plus d’une cinquantaine d’industries différentes et de 2.000 à 5.000 processus.
La position des États-Unis devrait pousser Pékin à accélérer la mise en place du plan Made in China 2025. Dévoilé il y a trois ans, il vise à faire de la Chine un leader mondial dans 10 secteurs stratégiques dont l’aérospatiale, la robotique industrielle, les véhicules électriques, les logiciels et semi-conducteurs. Le plan prône enfin une plus grande indépendance concernant les composants électroniques avec un objectif de 70 % de produits achetés localement dès 2020.
Innover pour rester compétitif
Avec Made In China 2025, Pékin peut changer de paradigme économique. Plutôt que de s’attacher aux exportations et aux investissements de massif, la Chine cherche à se tourner vers des services et une production industrielle plus intelligente. Avec l’augmentation du coût de sa main d’œuvre, le pays doit, pour rester compétitif et soutenir sa croissance économique, améliorer sa chaîne de valeur et développer des technologies avancées.
Derrière Made In China 2025 se cache un plan encore plus ambitieux qui est de faire de la Chine la première puissance manufacturière mondiale en 2049, année du centième anniversaire de la République populaire. Dans ce cadre, l’indépendance high-tech lui est indispensable si elle veut manœuvrer librement. Pour accroître son savoir-faire, la Chine peut déjà compter sur de nombreux spécialistes travaillant à travers le monde, sur des partenariats ou des acquisitions stratégique qui font régulièrement polémique de notre côté de la planète.
