Audrey-Laure Bergenthal, du droit des affaires au mannequin connecté

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Audrey-Laure Bergenthal a quitté sa jeune et prometteuse carrière d’avocate spécialisée dans la propriété intellectuelle pour créer un mannequin connecté qui s’adapte à toutes les corpulences.

« Eurêka, j’ai trouvé ! » C’est cette fameuse formule magique prêtée à l’inventeur Archimède qui a frappé un jour l’esprit d’Audrey-Laure Bergenthal. La jeune femme, alors avocate stagiaire, se balade à Paris devant les boutiques du boulevard Saint-Germain. Un détail la chagrine : les mannequins exposés en vitrine sont les mêmes depuis des décennies, ils n’évoluent jamais. Par conséquent, ils ne sont pas adaptés aux silhouettes qui, elles, changent au fil des ans. 

C’est de ce constat qu’est né Euveka, en hommage à la formule « Eurêka ! » mais aussi à EVK, les initiales d’Élisabeth Von Osterreich Kaiserin, mieux connue sous le nom de l’Impératrice Sissi : la Bavaroise, lorsqu’elle impératrice d’Autriche, voyageait beaucoup. Pour aider ses couturières basées à Vienne, elle leur avait laissé un mannequin correspondant à sa grande et fine silhouette, atypique pour l’époque (1m70 pour 58 kg). 

Du droit des affaires au stylisme

Une femme prestigieuse et un mannequin sur mesure : le mariage parfait pour Audrey-Laure Bergenthal qui abandonne donc sa jeune et prometteuse carrière de spécialiste de la propriété intellectuelle pour se lancer dans la mode. Après un double cursus d’histoire (licence) et de droit des affaires (master 2) à l’université Aix-Marseille puis une licence d’histoire de l’art à la Sorbonne, elle est pourtant sur le point de démarrer nouveau cycle d’étude à Harvard. Seulement, son idée de mannequin lui trotte désormais trop dans la tête : elle ne pense plus qu’à ce projet et décide de faire une croix sur ses grandes études, au grand dam de sa famille.

Mais elle est bien décidée à se consacrer à la mode et à s’y former, afin de bien comprendre ce nouvel univers. Elle effectue pendant deux ans un BTS de stylisme et de modélisme puis travaille chez les grandes marques jusqu’à se lancer en solitaire en 2011 avec Euveka, alors qu’elle a 28 ans. Grâce à son entreprise, elle rédige et dépose le brevet d’un mannequin évolutif au mécanisme similaire à une porte automatique. Handicap, taille, corpulence… Le mannequin connecté s’adapte à tous les profils.

Les jambes s’allongent ou rétrécissent, le buste et les épaules grossissent ou maigrissent : le mannequin, basé sur un moteur, des roues et des axes, s’adapte en quelques secondes pour les besoins du modèle. Des ingénieurs l’aident à améliorer son prototype avec pour but, d’aider les marques à créer du sur-mesure en se calquant sur les besoins des marchés. Son argument est simple : la corpulence n’est pas la même à 60 ans ou à 30 ans et les subtilités culturelles font qu’un vêtement ne se porte pas de la même manière en Asie du Sud-Est ou en Europe du nord, sans compter les différences morphologiques.

Un projet made in France

Soucieuse d’inscrire son innovation dans un processus de développement durable (réduire la quantité des stocks pour plus de qualité et moins de gaspillage), elle mise sur du made in France, en basant son usine à Valence, dans la Drôme. Ses sous-traitants et la majorité des matériaux utilisés sont aussi d’origine locale. En 2019, l’entreprise Euveka dépasse les 100 salariés, portée par une croissance exponentielle et des prix d’innovation qui fleurissent dans l’armoire à trophée de sa créatrice : entre autres, le prix Madame Figaro Business with Attitude en 2019 et un autre au CES de Las Vegas en 2018.  

Faire du made in France a un coût : Euveka s’ouvre au financement participatif, Audrey-Laure Bergenthal tient à rendre sa marque inclusive et a besoin de ces financements pour mener à bien ses projets. Elle lève d’abord 1 million d’euros en 2015, puis 3 millions d’euros l’année suivante. Parmi ses clients, Chanel ou Adidas, des marques prestigieuses qui placent son nom dans cet univers qui se renouvelle sans cesse. Euveka ouvre un bureau à New-York et l’idée du mannequin connecté se diffuse partout autour du monde. Une réussite appréciée par la trentenaire qui ne compte ni s’arrêter en si bon chemin, ni se reposer sur ses lauriers. Faisant de l’enthousiasme son moteur, elle ne cesse de dire que son occupation favorite est de « réaliser son rêve ». Les yeux ouverts.

Photos : ledauphine.com

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