L’OCDE a dressé un constat implacable : en 2007, l’économie mondiale utilisait 60 milliards de tonnes de ressources naturelles (65 % de plus qu’en 1980), une consommation amenée à croitre avec une population humaine qui doit avoisiner les 9 milliards en 2050. Le modèle du « produire, consommer, jeter », caractérisant l’économie linéaire depuis la révolution industrielle, a prouvé ses limites. L’économie circulaire, sa théorie alternative entre doucement dans les mœurs des politiques et des entreprises, notamment au niveau européen.
L’économie circulaire a pour principe de diminuer la consommation des ressources naturelles et l’impact environnemental de la production de produits et services. Ce concept, inspiré de la théorie «du berceau au berceau», est l’objet d’attentions des pouvoirs publics. En 2015, l’économie circulaire était intégrée à la loi de transition énergétique française alors que la Commission européenne révélait un paquet législatif encourageant les industriels à en adopter les pratiques. En juin, l’institution publiait une étude sur le comportement des PME dans le domaine.
Des disparités géographiques et des pratiques hétérogènes
L’enquête, réalisée auprès de 10.618 entreprises de 1 à 250 salariés répartis dans les 28 Etats membres, montrait que 73 % des PME avaient mené au moins une activité liée à l’économie circulaire au cours des 3 dernières années. Toutefois, elle dévoile des disparités importantes, Malte affichant un taux de 95 % alors que l’Estonie ou la Bulgarie seulement 44 %. Dans l’ensemble, les entreprises d’Europe centrale et de l’Est montrent un certain retard face à celles d’Europe de l’Ouest.
Le recyclage des déchets est l’action la plus couramment menée par les PME européennes puisque 54 % disent recycler, réutiliser ou revendre leurs déchets. À l’opposé, l’utilisation d’énergies renouvelables est encore très marginale – 16% admettent y avoir eu recours – ainsi que la réduction de l’utilisation de l’eau avec 19 % de pratique. Entre les deux, 38 % des sociétés ont entrepris de réduire leur consommation d’énergie et 34 % ont repensé leurs processus de production pour réduire l’utilisation de matières premières.
Des difficultés administratives et de financement
Des PME ayant mis en place des actions d’économie circulaires, 38 % disent n’avoir rencontré aucune difficulté. Les autres invoquent souvent des difficultés administratives ou juridiques (34%) ou le cout d’adaptation à de nouvelles règlementations (32%). Toutefois, ces causes ne sauraient expliquer à elles seules les retards d’application. Ainsi un tiers des PME danoise admettent avoir rencontré des difficultés (contre 75 % en France en comparaison) et seulement 63 % ont mis en place des actions d’économie circulaire contre une moyenne européenne de 74 %.
Les sources de financement de l’économie circulaire sont limitées et éventuellement problématiques dans un contexte économique tendu. Les actions ont été autofinancées dans 70 % des PME les ayant implémentés. 46 % de ces entreprises y ont consacré de 1 à 5 % de leur chiffre d’affaires alors qu’une part marginale (5 %) a consenti un effort supérieur à 10 % des revenus. L’emprunt est utilisé et 13 % des PME ont sollicité des organismes bancaires. Les subventions apportent un faible support (2 %) même si certains Etats proposent des dispositifs comme les « banques vertes ».
Une lente mise en œuvre
L’enquête met en lumière les faiblesses de communication sur l’économie circulaire. Si 30 % des PME affirment rencontrer des difficultés pour obtenir les informations, 48 % admettent ne pas s’être intéressé à la question. Aujourd’hui seulement 7 % des entreprises interrogées pensent que l’information est suffisante et aisément accessible. Les politiques d’économie circulaire sont variables selon les Etats, et les législations récemment adoptées n’ont pas encore eu la résonance escomptée.
La Commission européenne est parfois regardée comme un frein et son paquet «économie circulaire» est l’objet de débats. La version élaborée par l’administration Barroso en 2014 a été supprimée car jugée peu ambitieuse. Sa réécriture a ralenti l’adoption de stratégies nationales. Toutefois, la nouvelle mouture est une régression pour certains eurodéputés et organisations écologistes. Enfin, les initiatives politiques mises en place se concentrent quasi exclusivement sur la gestion des déchets et délaissent les autres dimensions de l’économie circulaire.
Des motivations d’avantages économiques qu’écologiques
Les mesures adoptées sont souvent influencées par des contingences économiques bien qu’à même de répondre aux problématiques écologiques. Les Etats veillent à améliorer leur efficacité pour sécuriser leur approvisionnement en matières premières et en énergie et ainsi réduire leur dépendance aux importations. La dimension emploi est, elle-aussi, non négligeable et séduit des gouvernements devant faire face à un fort taux de chômage ; le ministère français de l’Economie estimait à 500.000 emplois le potentiel de l’économie circulaire.
La mise en place d’une stratégie d’économie circulaire est longue, coûteuse et laborieuse. Elle répond difficilement à des exigences de court terme des gouvernements mais aussi d’entreprises et les empêche de prendre des mesures adaptées. L’enquête de la Commission démontre la difficile implication des pouvoirs publics et des entreprises. Toutefois, elle donne la juste mesure des actions à entreprendre et du support à apporter aux PME européennes pour soutenir une nécessaire transition vers l’économie circulaire.
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