La robotique a amorcé ces dernières années un tournant décisif dans son histoire. Longtemps cantonnés aux utilisations industrielles, les progrès liés à la technologie et à la programmation ont permis aux robots de conquérir de nouveaux secteurs de la vie quotidienne. Bruno Maisonnier, créateur et président d’Aldebaran, société fondée en 2005, a pressenti cette mutation et s’est engouffré dans ce domaine prometteur en proposant des produits à la fois innovants et attachants.
Il s’appelle Nao, et ce petit robot haut comme trois pommes (58 centimètres) fixe son interlocuteur de son regard lumineux, avant de le saluer par son prénom et par un geste de la main. Les spécialistes reconnaissent en lui une prouesse technologique, couronnée par une célébrité encore inédite pour ce genre de machine. Car Nao déborde d’activité : premier robot reçu à l’Elysée par un François Hollande admiratif, il participe régulièrement au challenge RoboCup et se voit même accorder une chronique hebdomadaire chez Thierry Ardisson. Il aura fallu trois années de développement à Aldebaran Robotics pour mettre au point sa première réalisation. Pourtant, les résultats se sont révélés au-dessus de toute espérance, tant le robot humanoïde Nao s’avère perfectionné.
Un concept inédit
Les efforts de Bruno Maisonnier et de son équipe de chercheurs ont donc payé, et les observateurs ont été nombreux à saluer l’avènement d’un nouveau type de robot. Commercialisé en 2008 à des fins pédagogiques, le petit androïde a rencontré le succès dans plus de 70 pays, devenant un support de choix pour les élèves informaticiens et développeurs. Car Nao est entièrement programmable, et son code source ouvert permet aux étudiants de réaliser leurs travaux pratiques de la manière la plus ludique qui soit. Bien plus qu’un objet scientifique, la société française va jouer sur la sympathie dégagée par le robot pour en lancer prochainement la commercialisation auprès du grand public en tant que nouvel objet de compagnie.
Des performances époustouflantes
Bien que doté d’une interface de programmation et de paramétrage classique, la plupart des ordres donnés au robot peuvent être effectués vocalement, et ce dernier répond aux questions qui lui sont posées. La reconnaissance des visages, les réactions programmables en fonction de chaque interlocuteur, la détection des humeurs, l’apprentissage des préférences culinaires, musicales ou cinématographiques de ses propriétaires ont été développés dans le but de faire de Nao un compagnon pour toute la famille. Dans la même optique, Aldebaran a développé une autre machine baptisée Pepper. Capable, de manière encore plus aboutie, d’interpréter, de s’adapter et même d’exprimer des émotions, ce robot d’un mètre vingt, doté d’une autonomie de 12 heures, est d’ores et déjà opérationnel dans les boutiques de l’opérateur japonais SoftBank, où il accueille et guide les clients. Une exclusivité provisoire en attendant la commercialisation du produit en février 2015.
Bruno Maisonnier, de la banque à la start-up
Le parcours du fondateur d’Aldebaran, société aujourd’hui mondialement reconnue, est atypique à plus d’un titre. En premier lieu par l’origine professionnelle de Bruno Maisonnier, directeur, jusqu’en 2004, de la filiale polonaise du Crédit Agricole. Ce banquier depuis toujours passionné par l’univers des robots décide de donner naissance à son rêve en fondant sa société spécialisée. Sa vision de robots sortant de leur cadre industriel et de leur spécialisation à outrance va donner naissance à des machines entièrement paramétrables et capables de créer un lien avec leur entourage. Les prémices de cette nouvelle orientation sont alors visibles chez Sony avec son chien-robot Aibo, et chez le lapin Nabaztag, ancêtre des objets connectés.
Augmentation du capital
Malgré le succès généré par Nao, Aldebaran peine à devenir rentable, mais les perspectives de croissance du marché laissent son président serein sur l’avenir de la société. Les investisseurs partagent ce point de vue : Intel a investi en 2011 13 millions de dollars dans la société, et le japonais SoftBank a déboursé 100 millions de dollars pour acquérir 78,5% d’Aldebaran. Les ventes de Nao progressent de 20% chaque année, et chaque version des robots fabriqués par l’entreprise est personnalisable lors de l’achat, constituant ainsi une grande souplesse et une modularité capables de satisfaire une large palette de clients. Le chiffre d’affaires de l’entreprise, estimé à 18 millions d’euros en 2012, devrait dépasser cette année les 45 millions.
L’avenir est à la robotique
L’intérêt suscité par ces robots pas comme les autres est attesté par le nombre croissant de visiteurs de l’Atelier. Situé dans les locaux de la société, à Issy-les-Moulineaux, cet espace accueille des curieux venus de tous les horizons désireux de découvrir les produits fabriqués par le constructeur. Révélation de l’année pour les BFM Awards 2013, Bruno Maisonnier, en plus de la prochaine introduction de ses produits sur le marché des particuliers, développe un projet destiné au secteur très porteur de l’assistance aux personnes âgées. Face à la problématique du manque de main d’œuvre venant en aide à une population vieillissante, Romeo, du nom du futur robot d’Aldebaran, devrait faire son apparition dans les maisons de retraite dès 2017.
Quel prix pour un robot ?
D’autres projets sont en cours d’élaboration, dédiés aux interventions dans les zones à risques. Pour l’heure, le prix de Nao, écoulé à plus de 5 000 exemplaires, a été divisé par deux : vendu à son lancement 12 000 euros, il n’en coute plus aujourd’hui que 6 000, et devrait encore baisser. Pepper, le second robot proposé par Aldebaran, devrait être distribué aux alentours de 1 500 euros. De quoi rendre la robotique enfin accessible à un large public.
Nov 08, 2014 - 10:42 PM
Un pont point. La robotique est le domaine de l’avenir. L’Europe a presque raté le train, c’est bien si on peut rattraper notre retard.